Guerre de Troie - Suite de l'Iliade - Memnon
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Les Troyens se désolaient de leurs échecs répétés, et de la mort de la valeureuse et belle Penthésilée. Le vieillard Thymète les interrogeait en se demandant à quoi servirait de s'obstiner devant pareil ennemi.
Priam prit la parole pour lui répondre que ce n'était pas la perte de ces dernières batailles et de deux valeureux combattants; son fils Hector et la farouche Amazone qui permettait d'en décider et qu'il fallait du moins patienter jusqu'à l'arrivée du roi Memnon à la tête des noires et immenses  peuplades de l'Ethiopie qu'il avait depuis longtemps imploré de venir les secourir.
Le sage Polydamas, loin de s'opposer aux conseils du roi, se demandait ce qu'il adviendrait si Memnon lui-aussi venait à succomber. Ne serait-il pas prudent de rendre Hélène, les richesses qu'elle avait emportées et tout le butin qu'il pourrait désirer? Pâris injuria Polydamas pour toute réponse, encourageant au contraire les Troyens à le suivre au combat.
Polydamas n'hésita pas à lui répondre que sans sa coupable audace d'enlever la femme de Ménélas, un tel débat et tant de morts ne seraient pas à déplorer. Pâris accusa secrètement le coup mais en aucun cas ne voulut envisager de se séparer d'Hélène.
Or pendant ce temps, Memnon apparut à tête des nombreux Ethiopiens. Priam reçut généreusement ce prince, fils de l'Aurore et de Tithon que sa divine épouse rendit non-mortel. Il lui dit "Puissent les Grecs immolés par votre bras payer de leur sang les maux qu’ils nous ont faits! goûtez maintenant les doux présents de Dionysos, demain les armes vous ouvriront la carrière de la gloire"
Et il lui tendit une large coupe d'or massif, offerte à Zeus par Héphaistos lors de son mariage avec Aphrodite et que Zeus avait donnée à Dardanos, issu de son sang, laquelle fut reçu en héritage par Erichton, Tros, Ilios, Laomédon et Priam de son père avant de le céder à Pâris, si telle était la volonté des Dieux.
Pâris par Canova
Memnon prend en main ce vase précieux, et content d'en admirer la beauté : « Ce n'est point, dit-il, au milieu d'un repas qu'il convient de vanter son courage et de promettre de grands exploits. Bornons-nous à la jouissance tranquille des plaisirs du moment et demain vous jugerez de ma bravoure."
Cependant les immortels rassemblés dans le palais du maître de la foudre, savouraient le nectar et l'ambroisie. Le père des Dieux, à qui tout est présent, traçait d'avance les horreurs du combat: « Sachez, leur dit-il, que demain la mort de ses mains cruelles abattra des milliers de Grecs et de Troyens ; vous verrez les soldats massacrés, étendus avec les chevaux, sur la poussière, et les chars renversés sur les mourants. Pendant cet affreux carnage, qu'aucun de vous ne vienne embrasser mes genoux; qu'aucun ne me sollicite en faveur des héros qui doivent périr dans la mêlée; les Destins sont immuables, il n'est pas en mon pouvoir de les fléchir ». 
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Dès que l'aube a blanchi l'orient, les Troyens se hâtent de se revêtir de leurs armes. On voit avec les Ethiopiens divers peuples alliés qui ont uni leurs forces à celle du fils de Laomédon. Tous se rassemblent devant les murs de la ville.
Les Grecs surpris de voir l'ennemi prêt à les attaquer, courent aux armes ; mais toute leur confiance était dans l'invincible fils de Pélée. Assis sur son char et pressant ses coursiers agiles, il s'avance au milieu des siens avec la fierté de ces Titans, qui jadis ébranlèrent le trône même de Jupiter.
Antiloque
Amphore
Peintre de Tithon
Louvre
470 av JC
Déjà se forment les phalanges serrées des deux partis. On distingue surtout les noirs Ethiopiens. Le choc commence avec un bruit épouvantable; on croit entendre les mugissements de la mer en courroux, lorsque des vents orageux et contraires soulèvent de toutes parts les flots irrités ; le fer étincelant, rencontre partout des victimes. Le tumulte et les cris de la douleur, portent dans tous les rangs le désordre et l'effroi. 
Durant le combat, Memnon se porte sur Nestor lui-même. Pour arrêter la fureur du vainqueur, Antiloque dirige contre lui sa pique. Memnon irrité se jette sur Antiloque et lui perce le sein d'un dard aigu le plongeant dans une mort immédiate.
Nestor perd sous ses yeux son fils et ses espoirs. Il appelle Thrasymède et lui désigne le meurtrier. Phérée se joint à lui et ensemble fondent sur Memnon. Durant la mêlée, Memnon ose détacher les armes d'Antiloque. Nestor lui-même va au combat, mais Memnon respectant son âge refuse de l'affronter.
Nestor se retire avec la douleur de laisser Antiloque étendu parmi les morts. Ses membres affaiblis par une longue carrière, ne secondaient plus son courage. Sa retraite forcée, entraîne celle de Thrasymède, de Phérée, et des autres chefs qui ne purent résister au redoutable Memnon. 
Memnon
Vase
En ce moment, accablé de la perte de son cher Antiloque, Nestor s'approche du fils de Pelée. « Tu vois, lui dit-il, un père malheureux qui vient d'être témoin de la mort de son fils. Memnon, son meurtrier, emporte ses armes, et va livrer son corps aux plus vils animaux. Hâte toi de venir à son secours ; il est beau de servir un ami, même après qu'il a cessé de vivre ». 
Achille ému, quitte le combat contre les Troyens et se porte contre Memnon. Achille le frappe d'un long trait à l'épaule droite et le blesse. Furieux Memnon armé d'une forte javeline, perce le bras de son adversaire et le sang jaillit. Chacun échangea sa divine naissance en paroles menaçantes. L'un rappelant sa mère l'Aurore et les Hespérides qui prirent soin de lui dans sa jeunesse, l'autre mentionnant Thétis, la Néréide chérie de Zeus, qui abrita Dionysos devant Lycurgue, recueillit Héphaistos précipité du haut de l'Olympe, et délivra le Dieu du tonnerre prisonnier de ses chaînes. 
Ils s'arment tous deux d'une longue épée. Les deux guerriers s'élancent l'un sur l'autre, et se portent maints coups qu'ils parent de leurs boucliers, chef-d’œuvre de l'art de Vulcain. Ils combattent de si près qu'on voit s'entremêler les aigrettes flottantes de leurs casques. Jupiter favorisant également ces deux chefs, les rend infatigables, et plus semblables à des dieux qu'à des hommes.
Dans les palais de Thétis, toutes les Néréides tremblaient pour les jours d'Achille; du haut de son char radieux, l'Aurore envisageait avec effroi le danger qui menaçait la vie de Memnon : les craintes de cette déesse alarmaient les filles du Soleil (Les Heures), placées par Jupiter dans l'orbe admirable que cet astre immortel doit parcourir pour marquer les jours et les ans, la naissance et la destruction des êtres, le temps et l'éternelle révolution des siècles. 
Leur courage paraît digne du sang de Jupiter, dont ils se glorifient d'être sortis ; Bellone (déesse de la guerre) prend plaisir à prolonger la durée de cette lutte sanglante, et à balancer longtemps entre les partis opposés, l'espérance de la victoire. 
Les deux héros enfants des Dieux s'attaquent avec une ardeur nouvelle; mais la balance entre les mains de la Discorde, cessant d'être égale, Memnon est blessé par Achille d'un coup d'épée qui lui traverse la poitrine et en fait jaillir en abondance un sang noir et fumant. Aussitôt la vie, ce doux présent des Dieux, fuit loin de lui. Il tombe, le bruit de son armure éclate dans les airs, et la plaine frémit à sa chute.
Alors la fille de l'Air (Aurore) s'enveloppe de voiles sombres, et laisse la terre dans d'épaisses ténèbres. Les vents dociles à la voix de leur mère se précipitent d'un vol rapide vers les champs de Troie, où ils environnent le corps de Memnon pour l'enlever avec eux dans les espaces célestes. Là, ils gémissent sur le sort déplorable de leur frère, et la voûte des cieux est frappée de leurs accents lamentables. 
Achille et Memnon - Bas-relief - Agrigente
Toutes les gouttes du sang que Memnon avait répandu, les Dieux les recueillirent avec soin, et en formèrent un fleuve qui porte aujourd'hui le nom de Paphlagonien parmi les peuples qui habitent les vallées de l'Ida.
Aurore et Memnon - coupe Doris - Louvre - 480 av JC
Les Éthiopiens ne demeurent pas séparés de leur chef. La déesse secondant le désir qui les anime, leur communique dès ce moment cette vitesse incomparable qu'ils eurent depuis sous une nouvelle forme, pour voler dans les airs portés sur un nuage, et devenus aussi légers que les vents qui enlèvent leur roi, . 
Dès que le flambeau du jour fut éteint, l'Aurore descendit, accompagnée des douze filles du Ciel (les Heures), dont les cheveux bouclés relevaient la beauté. Les Pléiades quittèrent aussi la brillante région des airs; et, réunies autour du fils de l'Aurore, elles mêlèrent leurs larmes à celles des autres divinités. 
Les sujets de Priam, désespérés de la mort du roi des Ethiopiens et de l'absence de ses troupes, rentrèrent dans leur ville. La joie des Grecs victorieux, était mêlée de tristesse. Campés dans la plaine, ils voyaient le champ de bataille couvert de leurs plus braves guerriers, et parmi ceux-ci le malheureux Antiloque ; mais d'un autre côté ils applaudirent au succès du fils de Pélée, et donnèrent de magnifiques éloges à sa bravoure. 
Aurore et Memnon - Lécythe
MAH Genève - 480 av JC
Les Ethiopiens achèvent à la hâte d'inhumer leur roi ; mais tandis qu'ils pleurent sur sa tombe, l'Aurore les change en oiseaux, qu'elle confie au vague des airs. Ce sont ces mêmes oiseaux que tous les peuples nomment aujourd'hui Memnonides. 
Enfin l'Aurore se laisse fléchir par le cortège des Heures, et reprend dans les Cieux sa course accoutumée. Les Pléiades avaient précédés le retour de l'Aurore ; celle-ci rallumant ses feux, ouvre les portes de l'Orient, et fait renaitre le jour. 
Funérailles de Memnon et
envol des Memnonides
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