Maurice Druon   -   Mémoires de Zeus   -  12/ Derniers Dieux
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Séjours parmi les hommes. Rencontre avec Sémélé la Thébaine. Nouvelle perfidie d'Héra.
A traverser vos cités et vos foules, je vis que la cinquième race n'était point vraiment heureuse ni véritablement bonne. Les défauts reparaissaient dans vos sociétés. Or il s'agissait d'une race nouvelle, formée sous mon règne et par mes travaux, une race dont j'étais responsable, à laquelle je m'étais uni, que ma descendance gouvernait, une race dont j'étais le potier.
L'Aube des Dieux
Il manquait à l'homme un bien, un Dieu, un principe qui lui permît de s'accepter tel qu'il était. Je pensais à ces choses un soir, observant vos visages dans les rues de Thèbes la cruelle, je rencontrai Sémélé, fille du roi Cadmos et prêtresse de la Lune. Que Sémélé soit née d'Harmonie, nul n'en pouvait douter lorsque, conduisant le collège des danseuses sacrées, elle évoluait sur le parvis du temple. Mais elle venait aussi s'asseoir, la nuit, sur le sol des cours d'auberge pour écouter les conteurs, à la lueur de la lune et des torches de résine. Elle avait le goût de l'escapade.
Et puis le lendemain, en jupe longue, les seins nus, le front et les bras couverts de joyaux, elle reparaissait sur le parvis, au son des sistres, ses longs balancements, ses bonds et ses extases. Ce fut devant un combat de lutteurs que nous fîmes connaissances. Sémélé, poussée par les spectateurs, était comme écrasée contre moi, frémissante, haletante. Je jetai aux lutteurs une poignée d'oboles pour redonner violence à leurs assauts. Sémélé me saisit la main et y enfonça ses ongles. Elle était bien la descendante d'Arès. 
Les Jours des Hommes
Nous nous revîmes souvent lors de fête, de jeux, de rixes ou d'incendies. Sémélé m'occupait l'esprit et de l'Olympe je surveillais Thèbes et, dès qu'une foule s'amassait, j'accourais. Lors de la dispersion des badauds, j'entrainais Sémélé vers une fontaine et là, nous parlions longuement. Je désirais la séduire, autant qu'elle désirait être séduite. Mais je ne voulais pas cette fois abandonner mon apparence de mortel. Bientôt, ses flancs s'alourdirent.
Sémélé - Anne-Lan
Jupiter et Sémélé - Jean-Baptiste Deshays de Colleville
Mes allées et venues à Thèbes avaient éveillé les soupçons d'Héra. Mais pour ne pas être à nouveau pendue par les cheveux, elle usa de ruse, se déguisa en vieille mendiante. Nous nous regardions et feignions d'être mutuellement dupes de nos travestis. Sémélé ne cachait pas son état et avait annoncé à son père Cadmos qu'elle était grosse de Zeus et Cadmos n'en était pas étonné. Mais la vieille mendiante clabaudait partout que la fille du roi mentait pour couvrir son péché.
Les sœurs de Sémélé, jalouses, se hâtèrent de propager la calomnie. Dans la ville, au palais, on regardait Sémélé avec mépris. Les prêtres se concertaient. Sémélé se fit conduire la mendiante. Elle lui dit qu'elle ne faisait que rapporter la rumeur et que Sémélé, elle même, devrait être plus sure, car son amant n'est pas de la ville. Sémélé frappant du pied, affirmait qu'il s'agissait de Zeus. La mendiante eut un regard méchant. "Alors - lui dit-elle - si c'est Zeus demande lui de se montrer à toi dans son aspect de Dieu. Tu n'auras plus de doute et la ville non plus."
Quand je revis Sémélé, grosse de sept mois, elle me demanda pour le bien de l'enfant qu'elle portait, de lui accorder ce qu'elle voulait me demander. Je promis et même jurai par le Styx. Je l'aimais. Mais dès qu'elle eut formulé sa demande, je compris le tour affreux que mon épouse lui avait joué. Je ne pouvais plus me dérober et si je l'avais fait, la colère du roi et des prêtres se serait abattue sur elle. Il l'aurait déchirée, lapidée, assommée.
Je me fis le plus prudent que je pus, avec la plus faible foudre, celle qui n'embrase qu'un arbre, qu'une forêt, qu'une seule cité. C'était trop pour qu'une vie humaine en pût supporter l'éblouissante incandescence. La malheureuse Sémélé eut-elle le temps de voir le terrible éclair qui surgit de mon poing ? Pourquoi faut-il détruire ce que l'on aime ? Je me précipitai pour arracher de ses flancs l'enfant mâle qu'elle portait. Plus tard, Cadmos et ses prêtres ne retrouvèrent qu'une mince forme noirâtre, au pied d'un pin calciné, portant les bijoux dessoudés de Sémélé.
Dionysos. Son enfance menacée. La vigne et l'ivresse. Le cortège des Bacchantes. Périple et fonction libératrice de Dionysos.
Avec un embryon de Dieu sur les genoux qu'il me fallait nourrir et cacher, j'appelai à l'aide l'inventif Hermès. Je l'avais placé à l'aine pour qu'il eût plus chaud et cela donna à Hermès l'idée de le placer dans la cuisse d'une grande statue et de demander d'entretenir en secret un feu de braise autour. C'est pourquoi on fit dire qu'il était né de la cuisse de Zeus.
Quand nourri de lait et de miel comme je le fus, Hermès vint le prendre et le remit au roi et reine d'Orchomène. Mais Héra comprit qu'il s'agissait de l'enfant de Sémélé et frappa de démence le roi et la reine d'Orchomène. Hermès reprit mon fils et le confia très loin, en Asie, aux nymphes de Nysa en recommandant qu'il soit toujours couvert d'une toison de bélier. On le nomma alors Dionysos ce qui veut dire à la fois "Dieu de Nysa ou celui qui est né deux fois."
Dans cette vallée de Nysa pousse une plante merveilleuse, la vigne et très vite Dionysos imagina de presser les grains, comme on presse le pis des brebis pour obtenir le lait, les grains du blé pour extraire la farine ou les olives pour en tirer l'huile. Il inventa le vin. Dès qu'il en eut goûté, il éprouva un bien être incomparable et se sentit vraiment le Dieu qu'il était. Il eut chaud et rejeta la toison de bélier. Héra l'aperçut et le frappa de folie.
Commença alors une étrange course à travers le monde, joyeuse et triomphale ou furieuse, insensée, délirante. En Phrygie il rencontra sa sœur Déméter qui l'initia à ses mystères, c'est pourquoi le pain et le vin sont unis dans la célébration des mystères. Dionysos, encore nommé Bacchus, allait couronné de lierre ou de vigne vierge, tenait un sceptre de bois, le thyrse, terminé d'une pomme de pin. Il était suivi des nymphes qui l'avaient nourri; les Ménades ou Bacchantes. A peine vêtue, elles jouaient  de la flûte ou du tambourin, dansaient sur les chemins et les places et avaient le pouvoir de dompter les fauves.
A ce cortège se joignaient les dryades, faunes, satyres, des mortels en quête de violence, d'aventure ou d'ivresse, des soldats et danseuses avec à leur tête, leur chef, coupe d'or à la main, sur un haut char tiré par des panthères. Partout, Dionysos instituait son culte et implantait la vigne. Un roi de Thrace voulut interdire cette culture, il prit une faux, coupa les ceps et fou de rage coupa les pieds de ses fils et les siennes propres. Des pirates un jour, s'emparèrent de Dionysos ivre sur une plage, pour en tirer rançon. A peine à bord, ils virent une vigne grimper au mât, s'entortiller aux agrès, nouer les avirons. Et furieux de colère, le Dieu devint un tigre et un lion qui se mirent à bondir dans l'embarcation. Les pirates se jetèrent à l'eau et se noyèrent.
Dionysos pouvait chanter aussi merveilleusement qu'Apollon et disserter magistralement comme Hermès. Il alla en Asie Mineure, en Egypte, en Libye, puis il alla en Indes, il pensa venger la mémoire de sa mère et il revint. Passant à Ephèse, il repoussa l'armée des Amazones, les obligeant au culte de la ruche comme du vin, à Naxos il consola l'inconsolable Ariane, et il arriva à Thèbes. 
Le roi Penthée descendant de Cadmos, était un despote austère qui n'apprécia pas ce campement de nomades qui défilaient dans les rues en dansant et têtes nues. Son peuple soudain se débauchait, les femmes rejetaient leur voile, les ouvriers leur labeur et même Tirésias, le devin aveugle, s'était couronné de pampres et dansait. Ce dernier, conseilla au roi de ne pas s'opposer à ce jeune homme, car il était Dieu.
Dionysos - Villa Borghèse
Penthée donna l'ordre d'arrêter les nomades et leur chef. Le soir l'émeute grondait, les grilles de la prison furent ouvertes, la palais incendié. Penthée prit la fuite et fut rejoint par un groupe de femmes thébaines, ivres de vin et de liberté. Elles lui tranchèrent la gorge au pied d'un pin, de la main même de sa propre mère qui ne le reconnut pas.
La vigne fut plantée à Thèbes, un culte fut institué en l'honneur de Dionysos et de Sémélé. Héra comprit qu'elle ne pouvait plus s'opposer à son triomphe universel et l'accepta aux rangs des Olympiens. Avant d'occuper ce trône, Dionysos se rendit aux Enfers afin de ramener sa mère sur l'Olympe. Ce Dieu vous est nécessaire au même titre que la Raison, le Savoir ou la Loi. Il est un Libérateur dans l'état comme Prométhée l'est dans le devenir.
Vous participez à son œuvre lorsque vous mettez des masques, portez costumes de carnaval, vous travestissez en soldats ou en tigre. De même l'acteur qui sur le théâtre coiffe le diadème de l'empereur, renverse les fausses idoles, succombe à un amour malheureux, réalise pour lui, comme pour vous, un acte dionysiaque. De même le voyage et encore l'ivresse efface l'infirmité de ne pouvoir être que ce que vous êtes et promis à disparaître. Dionysos est le guide qui vous manquait et le meilleur cadeau que l'on pouvait vous faire.
Ariane et Dionysos - peinture murale Musée Getty - Malibu - 75 av JC
Les femmes dionysiaques. Antiope, Electre et Danaé parmi bien d'autres. La nuit d'Alcmène.
Les hommes dionysiaques pour se libérer ont l'aventure, l'exploit, la représentation artistique ou la débauche. Les femmes dionysiaques n'ont que l'amour pour apaiser leurs démons et accéder à l'illusion fugace d'étreindre le monde. Quand vous voyez vos files ou vos épouses le regard rivé à leur miroir, immobiles contre le fût d'un arbre, vous dites qu'elles rêvent, mais vous ne savez pas à quoi !
Moi, penché au balcon des nuages, j'entends monter leurs appels muets et je distingue sans peine le dessin de leurs songes. 
Belle Antiope, tu attendais d'être violée par un satyre, je me suis fait des pieds de chèvres, des cuisses velues. Que tu aies fini folle, n'est pas ma faute, tu étais déjà folle avant de me connaître.
Electre de Samothrace, tu me voulais danseur, serpent, flamme, gel. J'ai dansé pour toi sur des charbons ardents, puis revêtu l'aspect d'un serpent sacré pour t'étreindre de spires glacées.
Chère Danaé, ardente Danaé, que ton père jaloux avait enfermée dans une chambre de bronze et qui tendais ton ventre à la caresse du rayon de lumière tombant du soupirail. Je revêtit la chlamyde et les traits de ton frère. Je lançai une pluie d'or qui te permis d'acheter tes gardiens. Notre fils Persée tua la Gorgone; délivra Andromède et changea ses ennemis en statue de pierre.
Moderne femme-serpent
Antiope et Zeus - Le Corrège
Je ne pouvais, même dans une vie de Dieu, répondre à toutes vos attentes. Apollon, Hermès, Dionysos et d'autres fils divins m'ont souvent relayé. Toutefois je n'entends pas renier le goût que j'ai eu de vos amours. Mes meilleurs plaisirs, je les ai connus sous la forme humaine. Vous avez la grande chance que l'amour pour vous soit aussi un acte mental, un exercice de l'esprit.
De toutes les obsessions amoureuses qui hantent les nuits des mortelles, Alcmène abritait l'une des plus subtiles. Elle voulait tromper Amphitryon avec . . . Amphitryon. Je choisis Alcmène à la grâce fragile, aux cheveux soyeux, relevés par un ruban. Revêtir la cuirasse d'Amphitryon, coiffer son casque, prendre sa voix, tout cela ne fut qu'un jeu. Mais elle entendit de la bouche d'Amphitryon les paroles qu'elle voulait entendre. Je lui racontais ma victoire, tandis que le vrai, était en train de la remporter, elle reçu l'ordre de se dévêtir, de s'étendre comme si elle eût été mon champ de bataille. Quel merveilleux sommeil nous eûmes après, heureusement réveillé par un âne brayant dans la cour.
Danaé - Léon Comerre
Alcmène, Héraclès et Amphitryon Hermès, grimé en valet, bernait le général vainqueur. J'avais envie de garder encore un peu ma forme d'homme et m'arrêtai dans une auberge. J'y goûtai le fromage frais, le gobelet de vin clair. Autour les marchands, les apprentis potiers se mirent à me confier leurs soucis; ici, l'un venant de Némée s'inquiétait d'un Lion qui répandait la terreur, là un autre, pêcheur de Lerne abandonnait son métier à cause de l'Hydre qui s'était réveillé dans le marécage.
Je les rassurais. Tout va s'arranger. Je venais d'engendrer Héraclès.
Héraclès ou le malheur des forts. Ses crimes et ses trahisons. La maison d'Admète et les pieds d'Omphale.
Héraclès et le Lion de Némée
Si Amphitryon n'avait pas fait tant de bruit, l'affaire ne serait pas venue à l'oreille d'Héra et l'enfance d'Héraclès aurait été moins difficile. Pas de serpents terrifiants dans son berceau qu'il étouffa de ses menottes, ni ses crises de violence furieuse dont il souffrit sa vie entière. Héraclès était bon, il s'efforçait d'être juste, mais par moments il était fou.
Fils d'une mère qui se donnait des grands airs de vertu pour avoir été fidèle jusque dans l'adultère, engendré par un père jamais vu mais tout-puissant, inégalable modèle, élevé par un homme d'esprit peu délié mais valeureux aux combats, Héraclès n'avait pas les sentiments primaires que vous lui croyez, il avait une âme nouée de ces contradictions.
Le royaume de Mycènes devait lui échoir mais je me félicite de ce qu'Ilythie, brouillant l'ordre des naissances ait fait passer le trône à une branche collatérale. Quels drames à la tête d'une nation, aurait-il pu causer ? Enfant, il tua son précepteur d'un coup de tabouret pour une banale remontrance. Il épousa Mégara fille du roi de Thèbes qui le remerciait, il en eut des enfants mais que se passa-t-il ce jour là, pour que furieux il fracassa le crâne de ses enfants qu'il chérissait et qu'il assommait Mégara. Il allait se tuer s'il n'avait rencontré Thésée qui le ramena à la raison. Et il l'encouragea à consulter l'oracle de Delphes.
Mais devant le sanctuaire delphique, prit de colère, il renversa la prophétesse et brisa le trépied d'or. Je dus calmer les Dieux et la Pythie put rendre son oracle. Il devait se mettre au service de son cousin Eurysthée, roi d'Argos, qui lui désigna douze tâches expiatoires. Il rapporta si vite la peau du lion de Némée qu'Eurysthée lui interdit dorénavant de franchir les portes de la ville.
On le dirigea sur Lerne où s'abritait une Hydre dans les marécages. Il assécha le marais. Il dut ensuite détourner un fleuve pour nettoyer les écuries d'Augias. Il s'acquitta de ses exploits un par un. Héraclès voulu s'embarquer avec Jason mais il eut d'autres projets. Souvent dans les banquets où il buvait, il se croyait insulté et il pouvait tuer des rois qu'il avait sauvé le matin.
Chez Admète, il entre, trouve son hôte en deuil, l'interroge et Admète par délicatesse lui répond qu'une femme est morte. Alors il s'installe, se gave, se saoule, chante, braille jusqu'à ce qu'il découvre que c'est Alceste, l'épouse de son hôte qui est décédée. Ne sachant que faire pour réparer, il descend aux Enfers, se bat contre les divinités de la mort et ramène Alceste à son mari.
Ce n'est que chez Omphale qu'il fut heureux, cette reine, dont le nom voulait dire "nombril"  le tenait par là, plus que par le sexe. Elle aimait abaisser le héros qui la servait au lit, l'insulter, lui ôter ses pouvoirs, l'enchaîner, le ridiculiser car c'était le triomphe qu'elle recherchait. Elle l'habillait en femme, lui faisait tenir le fuseau, Héraclès n'était pas à ses pieds mais sous ses pieds. Il était puni et il était content.
Héraclès ramène Alceste des Enfers
Nouveaux exploits d'Héraclès. Son neveu Iolaos. Les Pommes d'or. Prophétie de Prométhée. Thétis. Le libre arbitre et les Destins.
Au bout de trois ans de servitude auprès d'Omphale, Héraclès quitta sa délirante maitresse, en lui laissant trois fils, dont l'un serait l'aïeul de Crésus. Libéré de la chimère d'attendre des femmes une protection que l'homme est seul à pouvoir se donner, il était plus équilibré, plus raisonnable. Il prît et brûla Troie bien des années avant Agamemnon. Il abattit Hippocoon l'usurpateur de Sparte et laissa le trône aux vrais rois. Il marcha sur Elis et tua Augias qui ne l'avait pas payé et qui lui avait tendue une embuscade. Il institua à Olympie les jeux en commémoration de cette victoire. Iolaos, son neveu et compagnon de ses exploits fut le premier vainqueur de ces jeux. Iolaos qui plus tard fonda avec les Héraclides un royaume en Sardaigne, y fit venir Dédale.
Il lui restait le plus dur et difficile douzième labeur, celui d'aller cueillir des fruits au bout du monde. Les Pommes d'or poussaient en Ifrika dans les jardins confiés aux Hespérides et où des serpents s'enroulaient autour des arbres. Ces Pommes d'or qui poussaient aux confins de l'Atlantide engloutie, contenaient les secrets de la Vie, de la Connaissance et de la Sagesse.
Pour ce faire, Héraclès décida de consulter Prométhée. Il escalada le Caucase. Prométhée avait vieilli. Toute une nuit, ils s'entretinrent. Héraclès avait été initié par Déméter aux mystères de la terre, par Dionysos aux mystères de l'âme et par Prométhée aux mystères du feu. Il apprit aussi le chemin et les dangers qu'il faudrait surmonter.
Au matin, Prométhée prophétisa; "L'enfant qu'aura Thétis sera plus puissant que son père. Si Zeus s'unit à Thétis, son fils lui ravira l'empire du monde." Héraclès se demanda s'il devait avertir son père, mais Prométhée ne lui répondit pas. Héraclès devait choisir, se demander quel était l'arrêt des Destins, il était à la croisée des chemins. En bas du Caucase, il pensa que Zeus était le premier concerné et qu'il devait m'avertir.
Hercule et Omphhale - Jan Gossaert National Galerie Londres
Prométhée et Hercule - Christian Griepenkerl - XIX° siècle
Thétis ! J'ignorais qu'elle était un danger pour moi et je sentais une profonde inclination pour elle. On en était d'ailleurs plus loin de regard à regard. Thétis fille de Nérée et de son épouse Doris était l'avant dernière des soixante-dix-sept Néréides, la plus belle, la plus séduisante, la plus fantasque, la plus passionnée et aussi la plus ambitieuse. Tous les Dieux la courtisaient. Poséidon avait essayé vingt fois sans succès. "Je ne veux être qu'à toi, je ne serai qu'à toi." me murmurait-elle.
Elle ressemblait à mes amours de jeunesse, fleur inattendue éclose à la veille de l'automne. J'allai la cueillir demain . . . Pourquoi Prométhée avait-il révélé sa prophétie, il lui suffisait d'attendre pour accomplir sa vengeance ? Mais pouvais-je résister aux Destins même si je pouvais tenter de les contrer. Le Dieu de Thétis allait-il être le Dieu de trop, brisant les équilibres ? Prométhée me rendait mon libre-arbitre et ma liberté. Je pouvais le délié.
Le mariage de Thétis; La délivrance de Prométhée. La tunique de Nessus. Le bucher d'Héraclès.
Je décidai sans tarder de marier Thétis à un mortel et lui choisit Pélée, roi de Thessalie. Elle refusa avec une indignation extrême. Pélée dut coincer l'agile Néréide dans une grotte marine et elle dut céder sur une plage de galets. Je fis célébrer l'union de Thétis et Pélée en grande pompe sur l'Olympe. Et le fils qu'elle conçut fut bien plus puissant que son père, s'agissant d'Achille.
Zeus et Thétis - Anton Losenko
Héraclès revenait du jardin des Hespérides. Il avait délivré l'Arabie d'un prince funeste, Emathéon fils de l'Aurore, il avait occis Busiris pharaon vaniteux et cruel, étouffé le géant Antée au milieu des sables de Libye. Atlas l'avait instruit de la science du ciel et des astres. Il rapportait les Pommes d'or. Tandis qu'on présentait la corbeille à Thétis, la compagne d'Arès, Eris la Discorde se saisit d'une de ces pommes en s'écriant "A la plus belle". Athéna ramassa prestement les fruits sacrés. Je remis la corbeille à Héraclès en lui demandant de les rapporter là où il les avait pris. Dernière tâche inutile et seulement destinée à démontrer qu'elle peut être accomplie. "En rentrant, passe par le Caucase, car les temps sont arrivés." ajoutai-je.
Mariage de Pelée et Thétis avec les Dieux et les hommes
Cornelis Cornelisz van Haarlem
Il remis les pommes aux Hespérides et il était salué sur son passage. Avec l'Aurore, il arrivait au sommet de l'Elbrouz quand l'aigle descendait sur Prométhée, il décocha une flèche et abattit l'oiseau. Puis il s'arc-bouta - seul mortel capable de briser les chaînes forgées par les Dieux - et arracha de la roche les liens de bronze. Prométhée lâcha une larme et mettant ses chaînes sur son épaule comme une toge, il se dirigea vers l'Olympe. Je lui désignai son ancienne place pour qu'il s'y assît. et je sus que nous n'avions jamais cessé de nous aimer.
Héraclès venait d'accomplir sa dernière tâche. Il était vraiment l'Homme, celui qui a la capacité de surmonter ses fatalités. Il lui fallait bien mourir et c'est par Déjanire que la Parque trancha son fil. Déjanire était la sœur de Méléagre qu'Héraclès avait rencontré aux Enfers et s'en était fait un ami. Elle était si belle quand il vint la voir de la part de son frère, qu'il l'épousa. En rentrant, il allait traverser le fleuve Evenos quand le centaure Nessos voulut abuser de Déjanire. Héraclès le transperça d'une flèche, mais Nessos en expirant eut le temps de murmurer à Déjanire de récolter son sang. Elle devait y tremper une étoffe, qu'elle lui porterait pour retrouver son amour s'il venait à la délaisser.
Or à son retour du Caucase, Héraclès était pensif, comme absent. Se souvenait-il de Mégara, d'Omphale, de ses premières épouses, de ses maîtresses ou de cette jeune et belle captive Iolé qu'il regardait souvent. Déjanire était inquiète, se sentait délaissée, méconnue. Or Héraclès avait demandé un vêtement neuf pour consacrer un autel et Déjanire lui fit porter la tunique trempée dans le sang de Nessos.
Aussitôt qu'il eut endosser cette tunique, il éprouva sur tout le corps des brûlures atroces. Il voulut arracher le vêtement mais il lui collait à la peau et la chair s'en allait en même temps que les lambeaux du tissu. Le sang de Nessos était empoisonné et le poison avait envahi le sang d'Héraclès. Quand Déjanire apprit ce qui arrivait, elle perdit la raison et se suicida.
Héraclès quitta sa demeure, accompagné de son neveu Iolaos et de son ami Philoctète. Il gravit le mont Oeta et au sommet il entassa des branches en bûcher et s'y coucha. Il pria Philoctète d'allumer le feu. Je l'attendais là dans son ultime effort d'homme digne. Je m'élançai, arrachai aux flammes son lourd et vieux corps et le portai sur l'Olympe. Je lui rendis sa maturité et lui donnai l'immortalité. Héra se laissa convaincre d'abandonner sa haine et même elle accepta de lui donner notre fille en mariage divin, Hébé la Jeunesse. Il se tient sur l'Olympe, généralement auprès de Prométhée unis par une silencieuse amitié. Prométhée porte au doigt un anneau, fait du bronze de ses chaînes, et dans lequel est enchâssé une pierre du Caucase.
Hercule et Iole - gravure XVI° siècle
Ganymède. Le temps du Verseau.
Le mariage d'Hébé, suivant celui de Thétis, me laissait un vide et, de plus, personne ne servait plus l'ambroisie sur l'Olympe. Ganymède, descendant de Dardanos et d'Electre de Samothrace, donc un de mes arrière-arrière-petits-fils, gardait les troupeaux en Troade du roi son père. Nu, portant un chapeau phrygien sur ses cheveux blonds dorés, il avait dix-huit ans, et nul mortel ne serait jamais aussi beau. Il regardait avec fascination les aigles des collines de Troade. Un de ses aigles se posa près de lui, il n'en fut pas effayé et lui caressa les plumes. Il s'alanguit contre le dos de l'aigle et nous étions l'un et l'autre subjugués.
J'enlevai Ganymède sur l'aigle royal et l'emportait sur l'Olympe. A Tros son père je fis don d'un cep de vigne en or et de deux magnifiques chevaux d'attelage. J'instituai Ganymède échanson des Dieux et l'ai souvent convié à partager mes nuits. J'étais las d'entendre au travers de mes nombreuses épouses ou maîtresses les lointain et éternel échos de la Grande Mère. Pourquoi ne pas porter le même intérêt au principe mâle pour mieux se connaître en s'aimant en lui. Vous avez distingué amour et procréation. Ganymède est le divin verseur, divin verseau et lui ai donné le gouvernement d'un des signes du zodiaque, ère où vous entrez actuellement. C'est dans cette ère que vous saurez si vous êtes réellement divins.
Ganymède et l'Aigle - Angelika Kauffmann - 1793
Dernières amours. Olympias. Alexandre le Grand. Les Jupitériens.
J'eus d'autres amours et ne vous les conterai pas tous. Circé la magicienne, fille d'Hécate et d'Hermès, elle habitait les rivages du Latium. Dangereuse Circé qui n'aimait pas les hommes faibles comme vous l'avez appris d'Ulysse. La seconde Léda mis au monde Hélène aux flancs ardents mais à la cervelle légère, qui deviendra reine de Sparte, épouse de Ménélas, maîtresse de Pâris et qui fut la cause ou le prétexte de la guerre de Troie, mais qui vous suscita Homère.
 Et enfin Olympias que je rencontrai à Dodone où j'avais rencontré Niobé. Princesse d'Epire, danseuse sacrée elle fut envoyée à Samothrace où je me suis unis à elle. Elle donna le jour à Alexandre le Grand dont le père terrestre était Philippe de Macédoine; Alexandre fut instruit par Aristote. Il réunit toutes les armées de Grèce, passa en Troade, s'enfonça en Asie jusqu'à l'Indus. Il fut le résumé de mes différents fils. et il existe toujours de mes descendants qu'on appelle les Jupitériens et qui vous commandent et vous guident. 
Zeus et Olympias - Jules Romain - Palais du Te, Salle Psyché à Mantoue
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