Les Tragiques - Eschyle - Les Choéphores
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La deuxième pièce de l'Orestie, écrite en 458 av JC se passe à Argos, devant le tombeau d'Agamemnon. Oreste est rentré mais se cache, sa sœur Electre vient porter des libations (c'est le sens du mot Choéphores - porteur de libations). Electre découvre des offrandes et devine que son frère est revenu.
Oreste, accompagné de son ami Pylade, offre des boucles de ses cheveux sur le tombeau de son père. Une troupe de femmes voilées de noir s'avance et les deux jeunes gens s'éloignent. Oreste reconnait sa sœur Electre déployant son deuil et son chagrin.
Le chœur (composé de femmes agées et captives troyennes) s'avance hors du palais, sur ordre, pour des libations. Il tremble de ce songe qui proclama la rancune des morts et la fureur contre leurs assassins. Une femme, de l'enfer (Clytemnestre) l'envoie rendre un digne culte - indigne - pour détourner la catastrophe. La Justice pèse sur tous: Les uns, Son regard les atteint bien vite, les autres attendent plus tard pour pâtir.
Electre s'adresse aux serventes qui l'accompagnent "Vous qui assurez le bon ordre de la maison, puisque vous m'escortez en cette démarche de propriation, prêtez-moi vos conseils et que dois-je dire en versant ces libations funéraires. Ne me cachez pas votre pensée intime. Face au Destin que l'on soit libre ou dépendante d'autrui, c'est la même chose."
Le Coryphée (chef du Chœur) lui répond. "Pense en versant les libations à ceux qui ont Egisthe en haine (meurtier d'Agamemnon et amant de Clytemnestre)," Electre pense à elle-même et peut-être au Coryphée, mais celui-ci l'invite à mieux réfléchir."Souviens-toi d'Oreste, même s'il est loin. Puis pense aux coupables et au meurtre. Et demande tout simplement - un tueur, car c'est leur tour."
Electre sur la tombe d'Agamemnon
Frederick Leighton
Electre invoque Hermès de dessous-terre (donc du séjour des Enfers) pour qu'il vienne à son aide et qu'un bon vent ramène Oreste. Le Chœur reprend et accompagne le rituel d'un hymne chanté au mort. Le sol a bu la libation et a atteint son père. C'est alors qu'Electre voit sur le tombeau une boucle de cheveux coupés. Et n'a aucun doute qu'il s'agisse de ceux d'Oreste, tant il ressemble aux siens. Des traces de pas confirment ce sentiment.
Electre et les suivantes sur la tombe d'Agamemnon - Richmond
Oreste s'avance, suivi à distance de Pylade. Il lève les doutes de sa sœur en montrant un tissu qu'Electre avait tissé pour lui. "Puisse la Force, le Droit et Zeus nous assiter" dit-elle tremblante mais rassurée d'être si vite exaucée. Oreste prie Zeus, "Toi seul peux relever notre maison dans sa grandeur." Le Coryphée conclut "Quand la haine a parlé, que la haine réponde. Le cri souverain de Justice l'exige. Coup sur coup, mort pour mort ! Qui a fait doit subir ! Du triple fond des âges sonne cette voix-là."
Le Chœur reprend. "Oui, pour un père, ses enfants sont en droit d'appeler de justes représailles par l'immense sanglot dontils sont secoués." Le Chœur poursuit "Qu'il me soit donné d'entendre le cri jeté sur l'homme qu'on égorge et la femme qu'on saigne. Pourquoi donc cacherais-je ce qu'il en est de ma pensée intime."
Le Coryphée approuve "Le carnage appelle un Esprit de vengeance pour déchaîner, au nom des premières victimes; l'horreur après l'Horreur." L'échange alors entre Electre, Oreste et le Chœur montre l'affreux dilemne qui étouffe les personnages. Les Destins, les Erinyes, la Justice, la vengeance, sont tant de concepts contraires qui broient les coeurs droits. Puis le Choeur (qui était aux ordres de Clytemnestre pour surveiller Electre) se déclare "Nous nous rallions toutes d'un seul Coeur pour unir ici nos voix à la leur. Prête-nous appui contre tes ennemis."
Oreste mentionne "On verra s'opposer Le Meurtre au meurtre, le Droit au droit." Et Electre ajoute "Dieux, faites droit aux défenseurs du Droit !" L'un et l'autre prient les Dieux pour qu'il punissent les meurtriers, qu'ils restaurent la grandeur d'Agamemnon leur père qui n'eut pas de mort royale alors qu'il conduisit les Grecs à la victoire, qu'ils permettent à Oreste de succéder à son père et qu'Electre échappe au triste sort où elle est condamnée.
Le Coryphée commente alors le terrible songe que fit la reine (Clytemnestre pas encore nommée) qui fit qu'elle ordonna ces libations. Dans ce songe, elle mettait au monde un serpent qu'elle enveloppa dans un lange et à qui elle donna le sein. Le serpent lui déchira le sein et tira un caillot de sang avec le lait. Oreste comprend qu'il est le serpent-enfant et qu'il doit tirer le caillot de sang de la vengeance. Il conseille à Electre de rentrer au palais et il expose son plan de se présenter comme des étrangers avec Pylade venant de Phocide dont ils ont pris l'accent.
Le Chœur cite alors des femmes honnies, dont la première Althée qui jeta la buche sacrée au feu, celle-la même qui protégeait son fils (Méléagre) et aussi Scylla qui pour l'amour de Minos, coupa le cheveu (symbole de vie) de Nisos qui en mourut, et en dernier les épouvantables forfaits de Lemnos (les femmes avaient éliminé physiquement leurs époux pour vivre entre elles). Il commente aussi la liaison abominable qui a souillé cette maison et le complot médité par un cerveau de femme contre un héros.
* Dans Agamemnon, Clytemnestre a écarté Oreste enfant auprès de Strophios de Phocide. Oreste frappe à la porte du Palais. Le valet entr'ouvre la porte et Clytemnestre sort demander qui sont ces étrangers. Oreste se présente comme Phocidien de Daulis. Il voyageait quand il rencontra un homme qu'il ne connaissait pas (il se nommait Strophios de Phocide * comme lui indiqua la conversation) et il lui mentionna de dire à Argos qu'Oreste était mort.et que devait-il faire des cendres, les laisser loin des siens ou les rapatrier dans sa famille ? 
Clytemnestre gémit à cette nouvelle et déclare qu'elle attendait de bonnes nouvelles de son fils pour lui succéder dans ce palais décidemment maudit (dit-elle !) Clytemnestre accueille "l'étranger" au nom de l'hospitalité. La Nourrice (d'Oreste) entre, elle doit faire venir Egysthe pour qu'il interroge "l'étranger". Ses yeux sont noirs devant les domestiques, mais elle jubile en cachette que tout se finisse bien dans cette maison. Le Coryphée lui enjoint de demander à Egysthe de venir seul.
Egysthe arrive et veut vérifier la nouvelle. Il entre au Palais. Le Chœur prie pour que la Maison d'Agamemnon survive, quand on entend le cri d'Egysthe. Le Portier déclare "On a abattu le Maitre." Clytemnestre ouvre la porte du gynécée et demande ce que sont ces alarmes. "Les morts font périr les vivants" répond le portier.
Elle se heurte à Oreste, suivi de Pylade. Son fils lui dit "Toi aussi je te cherche. Lui son compte est bon." Clytemnestre répond "Malheur à moi ! Tu es mort; Egisthe, mon amour et ma force ?" Oreste termine "Tu l'aimes , Eh bien tu coucheras avec lui - dans le même tombeau. Il est mort, mais tu ne risques pas de le trahir !"
Clytemnestre s'agenouille et dévoile son sein. " Arrête, fils ! Respecte ce sein sur lequel tu t'es souvent endormi, mon enfant". Oreste se retourne vers Pylade et lui demande ce qu'il doit faire. Pylade lui rappelle les oracles de Loxias (Apollon l'obscur ou l'oblique), les édits de Delphes, la fidélité à ses beaux serments. "Il vaut mieux être en haine à tous plutôt qu'aux Dieux."
Oreste et Pylade tuent Egysthe et Clytemnestre - Flaxman
Clytemnestre l'implore, invoque les Destins mais Oreste lui confirme que "c'est le destin qui te vouait à la mort que voici". Clytemnestre prévient "Tu vas te heurter aux Erinyes maternelles (ou encore Furies) ". Oreste et Pylade entraine Clytemnestre dans le palais. Ils ressortent, à leurs pieds les cadavres des deux tyrans de ce pays. "Ils avaient ensemble jurer de tuer mon père et de mourir ensemble."
Oreste brandit l'étoffe qui servit à entraver honteusement Agamemnon au moment de son assassinat, comme le ferait un forban entravant les chevilles. "J'étais justifié à tuer ma mère: elle n'était que souillure et abomination à la face du Ciel". Il s'engage à partir au temple d'Apollon pour rendre compte et il demande aux Argiens de témoigner de son action auprès de Ménélas (frère d'Agamemnon).
Oreste voit alors "les chiennes enragées de sa mère" comme des Gorgones, toutes de noir-vêtues, des serpents emmélés autour d'elles (il s'agit des Erinyes, déesses des remords). Le Coryphée lui enjoint de tendre la main vers Loxias (Apollon) car "il t'affranchira de ces tourments". Mais Oreste n'y tient plus, il les fuit et quitte la scène.
*¹ le repas de Thyeste avec ses enfants morts et servis à sa table, la mort d'Agamemnon - roi et mari, la mort d'Egysthe et de sa maitresse Clytemnestre la reine, co-meurtiers du roi, père d'Oreste. Le Coryphée conclut "Voilà la troisième fois*¹ que l'ouragan atavique frappe cette maison pour tout sauver ou pour tout perdre ? Jusqu'où ira la route avant que tout s'apaise et s'endorme cette rage d'Enfer ?
Les Erinyes poursuivent Oreste- Flaxman
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